RECOMMANDATIONS

 

Dés qu’il eut recouvré un minimum de forces, Eragon s’avança dans l’allée, enjambant les monstres qu’il avait tués. Bientôt, Cadoc le rejoignit et trotta à son côté.

— Ouf ! marmonna le garçon. Tu n’es pas blessé.

Il remarqua que ses mains étaient agitées de spasmes violents, et que sa démarche était saccadée. Il ne s’en inquiéta pas. Il éprouvait un grand détachement intérieur, comme si tout ce qui lui était arrivé avait concerné quelqu’un d’autre.

Peu après, il aperçut Feu-de-Neige. Les naseaux de l’étalon frémissaient. Ses oreilles étaient plaquées contre son crâne. L’animal caracolait au coin d’une maison, prêt à détaler. Bien qu’évanoui, Brom était resté en selle.

Eragon entra en contact avec l’esprit de Feu-de-Neige. Quand le cheval fut un peu calmé, il examina Brom.

Le vieil homme avait une longue estafilade sur le bras droit, qui saignait abondamment. La blessure n’était ni très profonde, ni très large ; néanmoins, il fallait la bander, afin que le conteur ne perdît pas trop de sang.

Eragon caressa Feu-de-Neige, puis il descendit Brom de sa selle. Mais le poids le fit tituber. Stupéfait de sa propre impuissance, il laissa choir son compagnon sur le sol.

Un cri de rage remplit sa tête. Saphira fendait le ciel. Elle atterrit avec violence devant lui, ses ailes encore à demi déployées. Elle sifflait avec colère, ses yeux brûlaient de fureur. Sa queue fouetta l’air au-dessus de la tête d’Eragon.

« Tu es blessé ? » lança-t-elle.

« Non », répondit-il en remettant Brom sur le dos.

« Où sont ceux qui ont fait ça ? rugit la dragonne. Je vais les mettre en pièces ! »

« Par là, dit le garçon en désignant l’impasse. Inutile d’y aller, ils sont morts. »

Saphira eut l’air surprise : « Tu les as tués ? »

« Il faut croire », acquiesça Eragon.

En quelques mots, il lui résuma ce qui était arrivé tout en farfouillant dans le bât de Cadoc. Il cherchait les bouts de tissu dans lesquels était enveloppée Zar’roc.

« Tu as grandi », conclut Saphira sur un ton grave.

Eragon grogna. Il trouva un lambeau suffisamment long. Avec mille précautions, il releva la manche de Brom. Il nettoya habilement sa blessure ; puis il posa un bandage très serré afin d’arrêter le saignement.

« Si seulement nous étions dans la vallée de Palancar ! soupira-t-il à l’intention de Saphira. Là-bas, je saurais quelles plantes employer pour le soigner. Ici, je n’en ai pas la moindre idée… »

Il ramassa l’épée de son compagnon, qui gisait sur le sol essuya la lame, puis la remit dans son fourreau, à la ceinture de Brom.

« Partons, lui conseilla Saphira. D’autres Urgals risquent de traîner dans les parages… »

« Peux-tu transporter Brom ? lui demanda Eragon. La selle devrait le maintenir en place. »

« Soit, mais je ne te laisserai plus seul. »

« Très bien, vole au-dessus de moi, mais déguerpissons ! »

Eragon passa les bras sous Brom, essaya de le hisser sur le dos de Saphira. Il n’y parvint pas : les forces lui manquaient.

« Saphira ! Aide-moi ! »

La dragonne prit dans sa mâchoire un pan de la tunique du conteur, comme un chat eût saisi son petit. Arquant le cou, elle souleva le vieil homme et le déposa sur sa selle. Eragon n’eut plus qu’à glisser les jambes de Brom dans les étriers, qu’il ajusta à la bonne hauteur. Puis il leva les yeux vers le blessé, qui s’agitait en gémissant.

Brom entrouvrit les yeux et porta une main à son front. Il fixa le garçon, la mine préoccupée.

— Saphira est arrivée à temps ? murmura-t-il.

Eragon secoua la tête :

— Je vous raconterai plus tard. Vous êtes blessé au bras. Je vous ai bandé comme j’ai pu, mais il nous faut à présent trouver un endroit calme pour que vous vous remettiez…

Brom approuva, remua son bras et grimaça :

— Mon épée ! Sais-tu où elle est ? Ah, je vois que tu l’as récupérée !

— Saphira va vous porter, annonça Eragon.

— Tu es sûr ? Je peux monter Feu-de-Neige.

— Non, pas avec un bras dans cet état. De cette façon, vous ne tomberez pas, même si vous vous évanouissez !

— Je suis très touché, dit simplement Brom.

Il entoura l’encolure de Saphira de son bras valide, et la dragonne s’éleva dans un tourbillon. Eragon recula, ébouriffé par le souffle du décollage ; il retourna vers les chevaux.

Il attacha Feu-de-Neige à Cadoc, sauta sur sa monture et quitta Yazuac, suivant le chemin qui menait au sud. Celui-ci traversait une étendue minérale, virait ensuite sur la gauche et continuait le long des rives boisées du Ninor.

Petits buissons, touffes de fougères et parterres moussus bordaient le sentier. Il faisait frais sous les arbres, mais cette sensation de bien-être était trompeuse : Eragon n’était pas en sécurité.

Il ne s’arrêta en route qu’un bref instant, le temps de remplir les gourdes et de permettre aux chevaux de s’abreuver. Il décela sur le sol les empreintes laissées par les Ra’zacs. « Au moins, nous sommes dans la bonne direction », constata-t-il soulagé.

Saphira volait au-dessus de lui, ne le lâchant pas de ses yeux vigilants. Pour sa part, le garçon réfléchissait à ce qui venait d’arriver.

D’abord, il était inquiet de n’avoir rencontré que deux Urgals. C’est une horde de ces monstres qui avait massacré les villageois et pillé Yazuac. Où donc étaient passés les autres ? « Peut-être que les deux que nous avons combattus formaient l’arrière-garde… ou peut-être qu’ils s’étaient détachés du gros de la troupe pour piéger ceux qui auraient suivi la progression de leur armée… »

Ensuite, Eragon aurait aimé savoir comment il avait réussi à tuer les Urgals. Une idée – une lente révélation commençait à se faire jour dans son esprit : lui, Eragon, un garçon de ferme, s’était servi de la magie. Car c’était bien de magie qu’il s’agissait. Aucun autre mot ne permettait d’expliquer ce qui s’était passé. L’éclair bleu, l’explosion, l’onde de choc… Impossible de le nier ; il les avait vus ! Il était devenu magicien ou sorcier, d’une manière qui lui échappait.

Comment réutiliser ses nouveaux pouvoirs ? Il ignorait leur étendue, leurs limites et leurs dangers. « D’où me vient cette capacité ? se demandait-il. La magie était-elle le lot commun des Dragonniers ? Si tel était le cas, Brom est sans doute au courant ; alors, pourquoi ne m’en a-t-il jamais parlé ? »

Il grimaça, à la fois stupéfait et émerveillé par ces mystères, puis il contacta Saphira pour prendre des nouvelles de Brom… et pour partager sa perplexité avec elle. Elle s’avoua aussi surprise que lui par ses pouvoirs magiques.

« Nous nous sommes assez éloignés de Yazuac, à présent estima le garçon. Tu veux bien chercher un endroit calme où nous reposer ? D’où je suis, je ne vois pas grand-chose ! »

Pendant que la dragonne se mettait en quête, Eragon continua de longer le Ninor…

 

La lumière décroissait quand l’appel lui parvint : « Viens ! » Saphira lui envoya l’image d’une prairie entourée d’arbres, au bord du fleuve.

Il fit virer les chevaux dans cette direction et les mit au trot. Grâce aux indications de Saphira, il n’eut aucun mal à dénicher l’endroit en question. La clairière était bien dissimulée, personne ne les trouverait là.

Quand il y entra, un petit feu qui ne fumait guère y brûlait déjà. Brom était assis devant, le bras droit dans une position curieuse. Saphira était accroupie à côté du conteur. Elle semblait tendue.

« Tu es sûr que tu n’es pas blessé ? » insista-t-elle en dardant son regard perçant sur Eragon.

« Physiquement, non. Pour le reste… je ne saurais le dire. »

« J’aurais dû arriver plus tôt ! »

« Tu as fait ce que tu as pu. Nous avons tous quelque chose à nous reprocher, aujourd’hui. »

« Qu’as-tu à te reprocher ? »

« J’aurais dû rester près de toi. »

À peine eut-il prononcé cette phrase que son cœur fut comme embrasé par la gratitude de la dragonne.

— Comment vous sentez-vous ? demanda Eragon à Brom.

Le vieil homme regarda son bras et dit :

— C’est une belle estafilade, qui me fait affreusement souffrir. Mais je guérirai vite. Par contre, il faut que je change le bandage. Le précédent n’a pas tenu longtemps.

Ils mirent de l’eau à bouillir afin de nettoyer la plaie. Ensuite, Brom enveloppa son bras écorché dans un linge propre et déclara :

— J’ai besoin de manger pour reprendre des forces. Tu m’as l’air affamé, toi aussi. Dînons donc d’abord ; après, nous parlerons.

Lorsqu’ils se furent rassasiés, Brom alluma sa pipe :

— Maintenant, conte-moi ce qui s’est passé pendant que j’étais inconscient. Je suis très curieux d’entendre ça.

Les flammes tremblotantes se reflétaient sur le visage du vieil homme, dont les sourcils broussailleux se dressaient fièrement.

Eragon serra les mains, nerveux, puis lui rapporta les événements sans embellir la réalité. Brom resta silencieux tout du long, le regard impénétrable. Quand le garçon eut terminé son récit, le conteur fixa longuement le sol. On ne percevait que les crépitements du feu ; puis il se décida à parler :

— C’était la première fois que tu te servais de ce pouvoir ?

— Oui. Ce que j’ai fait vous rappelle-t-il quelque chose ?

— Plusieurs choses, en effet.

Brom se tut un instant, pensif.

— Tu m’as sauvé la vie, dit-il enfin. J’espère avoir un jour l’occasion de te le revaloir. Tu peux être fier : rares sont ceux qui, ayant rencontré un Urgal, en sont sortis vivants. Mais tu t’y es pris d’une manière extrêmement périlleuse. Tu aurais pu te détruire, et le village avec toi !

— Je n’avais pas le choix, se défendit Eragon. Les Urgals m’avaient coincé dans une impasse. Si je n’avais pas agi d’instinct, ils m’auraient réduit en bouillie !

Brom mordit le tuyau de sa pipe avec vigueur :

— Tu n’as pas idée de ce que tu as fait !

— Alors, expliquez-moi ! J’ai essayé de percer ce mystère de mon côté. En vain. Je ne comprends pas ce qui s’est passé. Que m’est-il arrivé ? Comment ai-je pu recourir à la magie ? Personne ne m’a jamais appris le moindre sortilège !

Un éclair illumina les yeux de Brom :

— Personne ne doit te l’apprendre ! Tu n’as pas à t’en servir !

— Pourtant, je m’en suis servi. Et je serai peut-être amené à m’en servir de nouveau. Mais comment le pourrai-je si vous ne m’aidez pas ? Où est le problème ? La magie est-elle un domaine réservé aux personnes sages… et âgées ? Mais peut-être que vous n’y connaissez rien ?

— Bigre ! gronda Brom. Tu poses des questions avec une insolence peu commune ! Si tu savais ce que tu cherches, ton attitude serait tout autre ! Ne me provoque pas !

Le conteur se tut, puis reprit d’un ton plus calme :

— La connaissance à laquelle tu aspires est au-delà de ton entendement.

Eragon protesta, exaspéré :

— J’ai l’impression d’avoir été jeté dans un monde dont je suis censé respecter les règles… qu’on refuse de m’expliquer !

— Je comprends, affirma Brom en jouant avec un brin d’herbe. Il est tard, et nous devrions dormir ; mais je vais te donner quelques pistes pour que tu cesses de me harceler… La magie que tu as pratiquée – car c’était bien de la magie – obéit à des règles précises, comme toute action. Il n’existe qu’un seul châtiment pour ceux qui violent les règles : la mort. Tes agissements sont limités par ta force physique, ton vocabulaire et ton imagination.

— Mon vocabulaire ? Qu’entendez-vous par là ?

— Encore une question ! s’écria Brom. Et moi qui espérais que tu t’en étais purgé… Mais tu as raison de la poser. Dis-moi, quand tu as tué les Urgals, n’as-tu pas prononcé un mot ?

— Si : brisingr.

Le feu flamba brusquement. Eragon frissonna. Le simple fait de proférer ce mot lui donnait la sensation d’être incroyablement vivant.

— C’est bien ce que je pensais, reprit Brom. Brisingr vient d’une langue très ancienne que parlaient, jadis, tous les êtres vivants. Mais, au fil du temps, elle fut oubliée en nos terres. Ce furent les elfes qui la réintroduisirent, lorsqu’ils arrivèrent ici par la mer. Ils l’enseignèrent aux autres peuples, qui s’en servirent pour réaliser des choses extraordinaires. Dans cette langue, il existe un nom pour chaque chose ; encore faut-il le trouver.

— Quel rapport avec la magie ? s’étonna Eragon.

— Nous sommes en plein dedans ! Ce langage-là désigne la vraie nature des choses. Il ne s’attache pas aux aspects superficiels que n’importe qui peut voir ! Ainsi, le feu se nomme brisingr. Brisingr n’est pas un autre nom pour désigner le feu, c’est le feu. Si tu es assez fort, tu peux diriger les flammes à ta guise rien qu’en disant : « Brisingr ! » Et c’est ce qui s’est produit aujourd’hui…

Le garçon médita ces paroles un moment.

— Pourquoi le feu était-il bleu ? finit-il par demander. Et comment se fait-il qu’il ait accompli exactement ce que je voulais ? Je me suis contenté de crier : « Feu ! »

— La couleur varie selon la personne qui prononce le mot. Quant à dire pourquoi le feu a exécuté tes désirs, c’est une question de pratique. La plupart des débutants doivent préciser ce qu’ils désirent. Plus ils deviennent expérimentés moins ils ont besoin de décrire ce qu’ils souhaitent. Un maître véritable n’aurait qu’à prononcer le mot qui correspond à eau pour créer quelque chose de très différent – un diamant, par exemple. Comment ? Pourquoi ? Cela est hors de portée de notre intelligence. Mais le maître, lui, percevrait la proximité entre l’eau et le diamant, et il focaliserait son pouvoir sur cette connexion. La pratique de la magie est le plus grand art qui soit.

Et le vieil homme conclut :

— Ce que tu as fait est extrêmement difficile.

Un message de Saphira interféra avec les pensées du garçon. « Brom est un magicien ! s’écria-t-elle. C’est grâce à la magie qu’il a allumé le feu, dans la plaine. Il n’est pas simplement en mesure d’en parler : il peut aussi la mettre en œuvre ! »

Les yeux d’Eragon s’écarquillèrent : « Tu as raison ! »

« Demande-lui d’où il tient son pouvoir, mais surveille tes paroles. Il est toujours risqué d’agacer ceux qui ont de telles capacités. Si Brom est sorcier ou magicien, qui sait pourquoi il s’est établi à Carvahall ? »

Eragon garda cet avertissement à l’esprit et dit :

— Saphira et moi venons de comprendre quelque chose : vous êtes magicien, n’est-ce pas ? C’est comme ça que vous avez allumé le feu, dans la plaine, quand je n’y arrivais pas…

Brom inclina légèrement la tête.

— J’ai quelques notions, en effet…, reconnut-il.

— Alors, pourquoi ne pas vous en être servi pour combattre les Urgals ? En fait, il y a eu d’autres occasions où un peu de magie n’aurait pas nui. Pourquoi ne pas nous avoir protégés pendant la tempête ? Et pourquoi ne pas avoir empêché la poussière de nous irriter les yeux ?

Le conteur prit le temps de bourrer de nouveau sa pipe avant de déclarer :

— Pour des raisons très simples, à vrai dire. Je ne suis pas un Dragonnier, ce qui signifie que toi, même quand tu te sens faible, tu es plus puissant que moi. Et puis, ma jeunesse est loin derrière moi. Je ne suis plus aussi fort que je l’étais. Quand je veux me servir de ma magie, c’est à chaque fois un peu plus difficile…

Eragon baissa les yeux, gêné :

— Je suis désolé.

— Il n’y a pas de quoi, répondit Brom en déplaçant son bras blessé. Tu ne pouvais pas savoir.

— Où avez-vous appris la magie ?

— Je préfère garder ça pour moi, mais je peux te dire que c’était il y a très longtemps, et auprès d’un excellent professeur. À présent, c’est à mon tour de transmettre son enseignement…

Brom cura sa pipe avec un petit caillou.

— Je sais que tu as bien d’autres questions à me poser déclara-t-il, et j’y répondrai… mais il te faudra attendre demain matin.

Le vieil homme se pencha vers Eragon, les yeux brillants :

— D’ici là, je ne dirai qu’une chose pour décourager toute tentative d’expérimentation de ta part : la magie entraîne une formidable dépense d’énergie. C’est pourquoi tu t’es senti exténué après avoir tué les Urgals. Voilà la raison de ma colère : tu as pris un risque énorme. Si la magie avait absorbé encore plus de ton énergie, tu serais mort. Il ne faut utiliser la magie que dans des cas exceptionnels, pour des tâches qu’on ne peut accomplir autrement.

— Comment sait-on si le sort qu’on lance va épuiser l’énergie qu’on a en soi ? demanda Eragon, un peu effrayé.

Brom leva les mains :

— La plupart du temps, on l’ignore. Aussi les magiciens doivent-ils connaître parfaitement leurs limites ; et, même ainsi, la prudence s’impose. Une fois qu’on a jeté un sort et libéré la magie, aucun retour en arrière n’est possible. Même si on comprend qu’on va mourir. Ceci est un avertissement : ne tente rien avant d’en avoir appris davantage. Et, à présent, cela suffit pour ce soir !

Ils déplièrent leurs couvertures. Saphira commenta, satisfaite : « Toi et moi, nous devenons plus puissants, Eragon. Bientôt, personne ne sera en mesure de se dresser sur notre chemin… »

« Peut-être, mais quel chemin choisir ? »

« Celui que nous voudrons », dit-elle en s’installant pour la nuit.

Eragon
titlepage.xhtml
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_000.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_001.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_002.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_003.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_004.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_005.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_006.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_007.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_008.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_009.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_010.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_011.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_012.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_013.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_014.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_015.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_016.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_017.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_018.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_019.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_020.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_021.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_022.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_023.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_024.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_025.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_026.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_027.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_028.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_029.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_030.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_031.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_032.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_033.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_034.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_035.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_036.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_037.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_038.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_039.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_040.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_041.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_042.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_043.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_044.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_045.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_046.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_047.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_048.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_049.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_050.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_051.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_052.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_053.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_054.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_055.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_056.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_057.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_058.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_059.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_060.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_061.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_062.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_063.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_064.html
Paolini,Christopher-[Heritage-1]Eragon(2003).French.ebook.AlexandriZ_split_065.html